L'ambassadeur et représentant permanent de la République du Vanuatu auprès de l'OMC parle du parcours de graduation, de résilience climatique et post-Covid-19, et explique comment le fait de quitter la catégorie des PMA signifie que le travail ne fait que commencer.
La pandémie de COVID-19 a eu des conséquences économiques et sociales importantes pour les pays du monde entier. Dans de nombreux cas, cette crise a anéanti les progrès qui avaient été laborieusement accomplis, ce qui a eu et continue d'avoir des conséquences défavorables persistantes sur le développement économique des pays. Compte tenu de tous ces facteurs, pouvez‑vous formuler des observations au sujet des résultats économiques obtenus par le Vanuatu ces dernières années et de la manière dont le soutien du CIR a aidé votre pays dans son processus de sortie de la catégorie des PMA?
Les résultats économiques du Vanuatu avant l'arrivée de la COVID-19 étaient positifs. Notre PIB enregistrait un taux de croissance de 4% chaque année. Au début de la pandémie en 2020, en dépit des perturbations au niveau des importations, des exportations et de la chaîne d'approvisionnement dues à la fermeture des frontières, l'investissement intérieur et l'investissement étranger direct ont continué de croître et le Vanuatu a tout de même connu une croissance économique. C'est maintenant, en 2022, que nous commençons à ressentir les effets de la pandémie. Nous avons toutefois eu la grande chance de bénéficier ces dernières années du soutien du CIR, dont la contribution joue un rôle moteur pour les programmes et projets mis en œuvre au Vanuatu. Sans le soutien du CIR, nous n'aurions peut-être pas été en mesure de mener certaines des activités qui ont contribué à la réussite du processus de sortie de la catégorie des PMA. Je pense que le Vanuatu a un bel avenir devant lui, mais que nous devons être conscients des circonstances et faire en sorte de relever les défis et d'avoir une gestion innovante.
Malgré de sérieux revers liés à l'accélération du changement climatique et à la pandémie, le Vanuatu a réussi à sortir de la catégorie des PMA en 2020. Étant donné qu'il reste toutefois très vulnérable aux chocs externes, pouvez-vous mettre en lumière les principales difficultés auxquelles il est actuellement confronté?
La sortie du Vanuatu de la catégorie des PMA en 2020 a été célébrée par nos citoyens. Cette même année, le Vanuatu a également commémoré les 40 ans de son indépendance. Cela a donné lieu à une célébration nationale. En 1980, nous avons pris notre place parmi les nations du monde en tant que pays indépendant, puis 40 ans plus tard nous avons été rayés de la liste des PMA. Pour nous, en tant que nation, cela a constitué une immense réussite. Nous étions très confiants quant à notre sortie de la catégorie des PMA et au fait de voir le Vanuatu prendre sa place parmi les nations et affirmer que nous étions prêts à relever les défis qui se présenteraient. Cela étant, loin d'avoir disparu, nos vulnérabilités demeurent. L'économie du Vanuatu connaît actuellement des contractions, en particulier dans les secteurs du tourisme et des transports. Des politiques innovantes et des réformes continues doivent être mises en œuvre, notamment pour redynamiser notre secteur productif intérieur, faciliter le commerce électronique et assurer la sécurité alimentaire.
Les changements se produisent aujourd'hui et nous devons redéfinir les domaines sur lesquels le Vanuatu devrait désormais centrer ses efforts. Nous observons un recentrage important sur le secteur productif. Il est assez réjouissant et intéressant de voir ces changements intervenir au Vanuatu. Je pense que la perspective la plus favorable pour nous consiste à lancer un programme de réformes socioéconomiques tenant compte non seulement de notre sortie de la catégorie des PMA, mais aussi de l'évolution de l'environnement qui nous entoure.
Compte tenu de ces difficultés et perspectives, quelle est la pertinence des principes opérationnels du CIR par rapport aux besoins d'un pays récemment sorti de la catégorie des PMA tel que le Vanuatu?
Le CIR est un partenariat multilatéral exclusivement destiné à aider les PMA à utiliser le commerce comme moteur de croissance. Nous sommes attentifs aux objectifs du Cadre et à la création de partenariats avec nos partenaires, d'autres pays et des organismes internationaux et régionaux. Les partenariats sont une composante très importante de ce que le CIR nous apporte. Le CIR a soutenu des programmes et projets destinés à renforcer notre capacité d'accroître la production de marchandises et de services non seulement pour le marché extérieur, mais aussi pour notre marché intérieur. Dans le domaine de la sécurité alimentaire, un pays ne peut pas exporter de denrées alimentaires tant qu'il n'assure pas l'approvisionnement de sa population. Il faut garantir cet approvisionnement avant d'envisager d'exporter vers d'autres pays. Pour cela, il est nécessaire de s'occuper des infrastructures nationales, fiscales et de commerce électronique, telles que les services publics, les lois et réglementations, ou encore les processus et procédures. Notre constat aujourd'hui est que le CIR, nos pays partenaires et les organismes nous soutiennent et appuient nos efforts.
Le CIR veille à ce que l'appropriation soit essentielle à l'aboutissement des programmes. Le Vanuatu a élaboré sa propre stratégie de lutte contre la pauvreté, conformément au Programme de développement durable à l'horizon 2030 de l'ONU, et le CIR et tous les autres pays et organismes partenaires collaborent afin de la soutenir. Les interventions du CIR au Vanuatu témoignent de cet engagement en faveur de l'appropriation par les pays et de la collaboration avec ces partenaires, sans chevauchement, sans doubles emplois et sans gaspillage.
Le Vanuatu a réussi ce qu'aucun autre pays insulaire du Pacifique n'était encore parvenu à faire, à savoir informatiser ses procédures douanières et ses processus de biosécurité, avec le soutien de la CNUCED dans le cadre du projet de guichet électronique unique. Il est également bénéficiaire du projet du CIR relatif à une infrastructure régionale de qualité, mis en place avec le Secrétariat du Forum des îles du Pacifique, et du projet d'harmonisation postale et douanière de la CNUCED et de l'UPU. Quelle est l'importance de ces projets pour le commerce de la région du Pacifique et comment profitent-ils au Vanuatu?
Ces projets sont des éléments constitutifs très importants du développement du Vanuatu. Ils constituent le fondement nécessaire à la facilitation et au développement de nos processus nationaux et de notre commerce extérieur. Ils accroissent l'efficacité des procédures et processus et rendent l'économie plus productive. Ils sont importants pour le développement du secteur privé, des micro, petites et moyennes entreprises, des grandes entreprises et des acteurs non étatiques. L'ensemble des acteurs bénéficient de ces initiatives. Le soutien fourni par la CNUCED et le CIR a été considérable.
Le retrait du Vanuatu de la liste des PMA a été très impressionnant, en particulier du fait que ces quelques dernières années, le pays a non seulement dû surmonter les conséquences économiques et sociales importantes des catastrophes naturelles répétées, mais aussi une chute majeure des recettes touristiques liée aux fermetures des frontières pendant la pandémie mondiale de COVID-19. À une époque où les vulnérabilités économiques sont exacerbées, certains se sont demandé si c'était le bon moment pour que le Vanuatu renonce à son statut de PMA. Toutefois, le Vanuatu a prouvé qu'il est bien équipé pour aller de l'avant et poursuivre sur cette voie du développement. À l'avenir, comment envisagez-vous l'évolution du Vanuatu vers le développement durable?
Il n'y a jamais de bon moment pour sortir de la catégorie des PMA. Les vulnérabilités ne disparaîtront jamais. Notre petite taille, la tyrannie de la distance vis-à-vis de nos marchés extérieurs et les catastrophes naturelles nous forcent à devenir résilients, à nous adapter et à faire en sorte d'être parés à toute éventualité et de pouvoir réagir et atténuer les effets. La pandémie de COVID-19 et la baisse consécutive des résultats de certains de nos principaux secteurs économiques, dont le tourisme, ont eu des conséquences de taille sur le Vanuatu. Dès lors, était-ce le bon moment pour que le Vanuatu renonce à son statut de PMA? Je crois que le Vanuatu a déjà répondu à cette question: nous étions prêts et en dépit des circonstances passées, actuelles et futures, nous assumerons toutes les responsabilités. Cela ne fait aucun doute. Désormais, nous devons regarder vers l'avenir et faire en sorte d'être prêts pour tout ce qui se présentera à nous. La sortie de la catégorie des PMA ne signifie pas que nous avons fait du bon travail. Elle vient dire que nous avons fait du bon travail, mais que nous pouvons faire mieux.
Alors qu'il est prévu que le Bhoutan, l'Angola, les Îles Salomon et São Tomé‑et‑Principe sortent de la catégorie des PMA, et que sept autres PMA pourraient le faire dans les années à venir, il y a beaucoup à apprendre de la préparation précoce du Vanuatu, de son courage, de son adaptabilité et de l'importance qu'il a accordée aux partenariats afin d'assurer un processus de retrait sans heurt de la liste des PMA. Quels conseils donneriez-vous aux pays qui sortiront un jour ou l'autre de la catégorie des PMA?
Chaque pays a une situation et des circonstances particulières, si bien qu'il n'est possible de s'exprimer que de manière générale. Nous sommes confiants en ce qui concerne nos amis du Bhoutan, de l'Angola, des Îles Salomon, de São Tomé-et-Principe et des autres PMA qui disposent de solides stratégies de sortie. Si nous nous efforçons de faire preuve d'innovation chaque jour, le pays n'aura de cesse de progresser. Je ne peux qu'encourager ces pays à élaborer une bonne stratégie de transition et à collaborer avec leurs partenaires et amis, qui les aideront à réaliser leurs aspirations en matière de développement.
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