Le pays, qui sort d'un conflit, s'emploie à atteindre des objectifs en matière de commerce régional et mondial. |
Devenir Membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) n'a rien d'automatique – il s'agit d'un processus qui comprend des engagements et des compromis, des questions et des réponses, des réunions et des négociations.
Le processus d'accession peut être rapide et durer moins de 2 ans comme ce fut le cas de la République kirghize, ou prendre 18 ans, comme pour les Seychelles, car des facteurs nationaux et internationaux influencent les progrès.
La Somalie a lancé son processus d'accession en 2016 en présentant une demande au Directeur général de l'OMC. À l'heure actuelle, en 2020, des progrès ont été faits. Par exemple, en avril, l'Aide‑mémoire sur le régime de commerce extérieur a été soumis – ce document expose les politiques commerciales et économiques du pays, ainsi que les accords commerciaux conclus avec d'autres pays. Sur la base de cet aide‑mémoire, les Membres de l'OMC ont soumis plus de 150 questions à la Somalie, auxquelles elle répondra.
"Nous avons décidé de changer la rhétorique selon laquelle la Somalie est et restera un simple bénéficiaire d'aide humanitaire et de nous engager sur la voie du développement et de la relance économique. Au départ, l'allègement de la dette était un de nos plus grands problèmes. En mars dernier, nous avons réussi à le surmonter et à satisfaire des critères exigeants en matière de génération de recettes et de changements structurels concernant le financement et la gouvernance", a dit M. Abdighani Jama, coordonnateur en chef du processus d'accession à l'OMC, Unité de l'économie et du commerce du Cabinet du Premier Ministre.
"Cela nous a encouragé à progresser dans d'autre domaines. Et devenir Membre de l'OMC comptait parmi les priorités. Le programme était donc le suivant: en premier lieu, l'allègement de la dette, en deuxième, l'OMC, en troisième, le continent africain, en quatrième, les autres institutions au niveau international pour améliorer notre commerce", a déclaré M. Jama.
En phase
En octobre, une autre étape a été franchie quand la nomination de l'Ambassadeur de la Suède auprès de l'OMC, M. Mikael Anzén, en tant que Président du Groupe de travail de l'accession de la Somalie a été confirmée. La première réunion du Groupe de travail est désormais attendue en 2021. Les réunions sont des éléments essentiels et permettent la tenue de discussions et de négociations entre les États Membres de l'OMC et le candidat à l'accession.
M. Anzén a dit: "Nous présidons le Groupe de travail, notre Agence nationale pour le développement (SIDA) apporte une aide au développement aux niveaux bilatéral et multilatéral et notre Direction générale du commerce extérieur contribue à cet effort en apportant une assistance technique, puis nous tiendrons un vaste dialogue avec les communautés de donateurs, les pays donateurs et les organisations intéressées."
"Pour nous, il n'est pas seulement question de la Suède et de la Somalie mais de tous ceux qui souhaitent soutenir ce processus et y contribuer. Il s'agit donc d'établir un réseau de parties intéressées et qui apportent un soutien", a‑t‑il ajouté.
En tant que pays moins avancé (PMA), la Somalie peut bénéficier d'un certain soutien pendant le processus d'accession à l'OMC, y compris de la part de partenaires de développement et au moyen de l'assistance bilatérale. N'oublions pas également les lignes directrices spécifiques sur l'accession des PMA qui visent à faciliter les progrès, ainsi que l'assistance technique de l'OMC.
Les PMA prennent en moyenne 12 ans et 3 mois pour accéder à l'Organisation tandis que pour les autres pays, la durée moyenne est de 10 ans et 1 mois.
"Nous disposons de nombreux éléments qui démontrent que, dans l'ensemble, les PMA qui ont accédé à l'OMC ont obtenu de meilleurs résultats que les autres. En l'occurrence, pour la Somalie, un pays qui sort d'un conflit, la stabilité est très importante en ce qui concerne le commerce et l'économie", a dit Mme Maria Perez Esteve, Conseillère à la Division des accessions de l'OMC.
Établir les bases
Accéder à l'OMC permet aux pays en développement et aux PMA d'accéder plus facilement aux grands marchés à des taux de droits plus faibles et est la promesse de l'amélioration du commerce et de la croissance économique.
"Lorsque la Somalie a obtenu son indépendance, nous exportions uniquement des produits primaires. Si nous parvenons à devenir partie à des accords commerciaux multilatéraux dans le cadre de l'OMC, nous pourrons nous employer à exporter des biens à valeur ajoutée. Il est temps de faire partie des chaînes de valeur mondiales", a dit M. Ahmed Warsame, Directeur du département du commerce et de la commercialisation au Ministère somalien du commerce et de l'industrie.
"Nous souhaitons accroître nos exportations vers les marchés internationaux, y compris les marchés européens, nord‑américains et asiatiques. C'est notre objectif. Nous devons également réformer nos politiques", a dit M. Warsame. "Il est important que dans un avenir proche, lorsque la Somalie sera stable, nous disposions d'un ensemble complet de règles, de politiques et d'accords dont nos négociants pourront se servir et qui leur permettront de tirer profit des droits de propriété intellectuelle au niveau mondial."
Le processus d'accession comprend des prescriptions sur la transparence et la clarté des politiques et des réglementations.
"Être Membre de l'OMC nous aidera en particulier à tirer profit de la Stratégie d'économie bleue sur laquelle nous travaillons actuellement. La Somalie dispose de la plus grande zone côtière d'Afrique – à savoir, près de 3 300 kilomètres avec des ressources halieutiques et marines", a dit M. Jama.
Il a fait remarquer que le pays n'était pas en mesure de contrôler la pêche dans ses eaux et que l'accession à l'OMC lui offrirait de meilleurs mécanismes pour faire face à ce problème.
"Si vous regardez la corne de l'Afrique, vous voyez une région qui a été en proie aux conflits. Si vous regardez les autres pays en Afrique, vous voyez qu'ils sont en avance par rapport à nous. Ils ont établi de solides relations commerciales par l'intermédiaire de la Communauté d'Afrique de l'Est. Ces deux dernières années, nous avons travaillé en faveur de l'intégration économique de la corne de l'Afrique, qui s'articulera autour de trois domaines: le commerce, l'infrastructure et le capital humain", a dit M. Jama.
"Pour moi, la corne de l'Afrique est la dernière frontière commerciale séparant les grandes forces qui la composeront. Cette situation vient de l'accessibilité, en particulier de la mer Rouge et de l'océan Indien et de la grande proximité des liens à l'est et à l'ouest. La Somalie est l'endroit le plus avantageux dans la région pour établir une plate‑forme logistique", a‑t‑il dit.
Modèle d'accession
Ceux qui participent au processus d'accession de la Somalie à l'OMC s'intéressent au Libéria et prennent son cas comme exemple. Le Libéria, un pays sortant d'un conflit et un PMA, a accédé à l'Organisation en 2016 au terme d'un processus de huit ans. L'Ambassadeur de la Suède auprès de l'OMC à cette époque, M. Joakim Reiter, était le Président du Groupe de travail.
"Alors que nous apportons maintenant notre soutien à la Somalie, nous tirons profit de notre expérience avec le Libéria: certaines choses sont similaires, d'autres sont différentes. Ce qui est tout particulièrement important pour les pays accédants, ce sont leur volonté et leur organisation. Apprendre comment fonctionne l'OMC et quelles sont les règles est tout un processus pour les pays accédants", a déclaré M. Anzén.
Mme Esteve a indiqué que l'accession pouvait contribuer aux efforts de consolidation de la paix dans des environnements fragiles et touchés par des conflits. Pour des pays comme l'Afghanistan et le Libéria, l'accession à l'OMC a été motivée essentiellement par la volonté de parvenir à une paix juste et durable grâce à la stabilité économique.
Le processus d'accession peut aider les institutions nationales en ce qui concerne les principaux piliers que sont la non‑discrimination, la transparence et la primauté du droit et, selon les éléments recueillis par l'OMC, les 36 pays qui ont accédé à l'OMC après 1995 ont, en moyenne, enregistré une croissance plus rapide – à la fois par comparaison avec les années antérieures à l'accession à l'OMC et avec la moyenne mondiale.
En ce qui concerne les prochaines étapes, la Somalie doit nommer un négociateur en chef pour l'accession à l'OMC, répondre aux questions des Membres de l'OMC, élaborer un projet de plan d'action législatif et progresser en tenant une série de négociations multilatérales, plurilatérales et bilatérales.
M. Warsame a indiqué que la Somalie était membre du Marché commun de l'Afrique orientale et australe (COMESA) et avait approuvé la ratification de la Zone de libre‑échange continentale africaine (ZLECAf) et que le gouvernement somalien, grâce à l'expérience ainsi acquise, était conscient de l'engagement et de la volonté politique nécessaires.
À propos des progrès commerciaux réalisés par son pays, M. Jama a dit: "La clé pour nous c'est la capacité. Je pense qu'il y a deux domaines dans lesquels nous ne sommes pas à la hauteur: les ressources humaines et les ressources financières. La Somalie connaît une pénurie de juristes spécialisés en droit commercial et de spécialistes du commerce. Nous essayons de gagner en rapidité. Nous espérons que dans quatre ou cinq ans, tous nos efforts seront récompensés et le mérite reviendra à la Somalie qui aura été le moteur de la réussite."
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