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L'Accord de l'OMC sur la facilitation des échanges (AFE) est entré en vigueur en 2017. Sa mise en œuvre devrait aider les pays en développement et les pays les moins avancés à réduire les inefficacités à la frontière et les coûts du commerce, leur permettant ainsi de profiter plus facilement des avantages découlant du commerce mondial. L'Accord montre que les Membres sont prêts pour la modernisation et l'harmonisation progressives des processus d'exportation et d'importation.
Le commerce d'espèces sauvages, qu'il s'agisse de plantes et d'animaux vivants ou de leurs parties et des produits obtenus à partir de ceux‑ci, ne fait pas exception à cet effort. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) est en vigueur depuis 1975 et réglemente le commerce international des spécimens d'animaux et de plantes à travers un système unique de permis et de certificats de commerce. La CITES a pour objectif d'assurer un commerce légal, durable et traçable. La relation entre la CITES et les Accords de l'Organisation mondiale du commerce est fondée sur le soutien mutuel.
Des discussions sur la modernisation de la délivrance des permis CITES et de leur gestion via un système électronique ont été engagées lors de la treizième session de la Conférence des Parties, en 2004. Depuis, les progrès technologiques ont rendu le système et ses avantages potentiels plus disponibles et plus abordables, non seulement pour les pays développés, mais également pour les pays les moins avancés.
Équilibrer les incitations
Aux fins de la mise en œuvre, il faut veiller à ce que les parties comprennent les avantages et la finalité d'un système informatisé. Pour de nombreuses parties, l'amélioration du commerce des espèces sauvages inscrites à la CITES consiste plus à s'assurer de la légalité du commerce qu'à accélérer le mouvement et le dédouanement des marchandises. Par conséquent, il est particulièrement important, dans le contexte du commerce des espèces sauvages, de trouver un juste équilibre entre les incitations en matière d'efficacité et les préoccupations relatives à l'application des lois.
Les premiers défenseurs du système électronique sont des pays importateurs dans des secteurs à forte valeur ajoutée, comme celui des produits de luxe (fourrures et cuirs de reptiles), et certains négociants en gros volumes qui échangent des produits tels que le bois d'œuvre et les plantes horticoles, pour lesquels il y a un intérêt commercial à réduire les coûts de transaction supportés par les négociants respectueux des règles.
Le commerce des espèces sauvages pâtit d'une très forte activité illégale, qu'il s'agisse du commerce frauduleux ou non réglementé, ou de l'introduction en contrebande de spécimens faisant l'objet de restrictions ou d'interdictions. Un rapport récent de la Banque mondiale estime le coût annuel de ces activités illégales à 1 000‑2 000 milliards de dollars EU, dont 90% correspondent aux services écosystémiques perdus dont le prix n'est actuellement pas fixé par le marché. Les coûts directs du commerce illicite d'espèces sauvages (à l'exception des espèces marines et du bois d'œuvre) représenteraient jusqu'à 20 milliards de dollars EU par an; ces activités attirent des groupes criminels transnationaux extrêmement organisés, en raison de la forte valeur que certaines espèces inscrites à la CITES peuvent atteindre.
Pour assurer le suivi et la réglementation efficaces du commerce des ressources tirées de la faune et de la flore sauvages, de nombreuses autorités auraient avantage à utiliser les processus automatisés et les outils modernes de gestion de l'information, surtout dans les pays en développement et les pays les moins avancés, qui sont souvent des États de l'aire de répartition de multiples espèces inscrites à la CITES à valeur élevée.
Mise en œuvre de eCITES
Bien que reconnaissant les difficultés liées aux coûts de transition vers un système informatisé, le Secrétariat de la CITES s'est associé avec divers partenaires pour développer un dispositif de mise en œuvre eCITES visant à faciliter l'adoption de permis électroniques dans le monde.
Le dispositif contient un guide baptisé CITES ePermitting Toolkit, qui comporte des règles et des normes applicables aux données élaborées par le CEFACT ONU et l'Organisation mondiale des douanes (OMD); un Cadre de mise en œuvre eCITES, assorti de recommandations sur la manière de planifier et de mettre en œuvre un système de permis CITES informatisé/électronique; un module appelé eCITES BaseSolution, conçu par la CNUCED, qui fournit aux parties une solution logicielle fondée sur des normes et peu coûteuse pour l'automatisation des systèmes de permis CITES et des échanges de permis électroniques; et des services de renforcement des capacités et de conseil fournis par le Secrétariat de la CITES pour élargir le soutien technique et l'appui à des projets associés à la mise en œuvre de ces outils.
De nombreuses parties à la CITES en sont actuellement aux premières étapes de la mise en œuvre, et un nombre croissant de parties ont manifesté leur intérêt pour commencer un projet ou examiner de plus près les prescriptions du dispositif, y compris des PMA comme le Mozambique et le Vanuatu. Cela peut s'expliquer par les progrès accomplis concernant la création et la mise en place de leur guichet unique national, comme le prévoit l'article 10:4 de l'AFE.
À ce titre, la décision 18.125 de la CITES sur les Systèmes électroniques et les technologies de l'information, adoptée lors de la dix‑huitième session de la Conférence des Parties à la CITES, en 2019, exhorte les parties à envisager l'utilisation du Cadre de mise en œuvre eCITES pour la mise en œuvre des systèmes de permis électroniques. Les parties sont également invitées à établir une coopération continue entre leurs organes de gestion CITES et leurs douanes nationales et les organismes à la frontière pour mettre en place des systèmes de contrôle fondés sur les risques pour le commerce des espèces inscrites à la CITES, ce qui est conforme à l'article 7:4 de l'AFE sur la gestion des risques.
Difficultés rencontrées pour la mise en œuvre
Alors qu'un nombre croissant de pays envisagent l'automatisation de leurs procédures de délivrance des permis CITES, certaines difficultés importantes persistent.
Premièrement, le volume des transactions commerciales relevant de la CITES est faible en comparaison avec de nombreux autres secteurs des produits de base. En revanche, ces transactions présentent un degré relativement élevé de spécificité. De nombreux PMA délivrent entre plusieurs centaines et plusieurs milliers de permis par an environ, pour lesquels la mise en place d'une solution de pointe est peut‑être difficile à justifier.
Le module eCITES BaseSolution de la CNUCED a été conçu pour relever ce défi; il se trouve actuellement aux étapes initiales de son lancement. Toutefois, les efforts doivent être poursuivis pour étudier la meilleure manière de donner accès aux solutions de permis électroniques pour les parties – en particulier les pays pauvres – dont le volume de permis est modeste, mais qui ont vraiment besoin de systèmes sûrs et rationnalisés.
Deuxièmement, les parties ont besoin de soutien pour établir des systèmes de contrôle électroniques fondés sur les risques dans le commerce international, afin d'exploiter pleinement le potentiel d'application des lois qu'offrent les procédures de délivrance informatisée des permis CITES. L'article 7:4 de l'AFE dispose que chaque Membre de l'OMC "adoptera ou maintiendra […] un système de gestion des risques pour le contrôle douanier" et "concentrera le contrôle douanier […] sur les envois présentant un risque élevé et accélérera la mainlevée des envois présentant un risque faible."
Le Secrétariat de la CITES œuvre de concert avec les partenaires pertinents, particulièrement à travers le Consortium international de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages (ICCWC), pour relever ce défi. L'OMD joue un rôle de premier plan dans le développement de divers outils et d'offres en matière de formation sur la gestion du risque et les techniques de profilage pour l'identification des envois présentant un risque élevé.
Perspectives d'avenir
Les systèmes automatisés et simplifiés peuvent être un outil très efficace pour toutes les parties, y compris les plus pauvres, pour faire progresser l'objectif de la CITES de garantir un commerce international d'espèces sauvages légal, durable et traçable.
Les principales difficultés sont au nombre de trois: faire ressortir la nécessité d'investir dans un système dont les coûts ne seront pas facilement recouvrés; maintenir un juste équilibre entre les efforts de facilitation des échanges et les besoins en matière d'application des lois à travers de solides systèmes de contrôle fondés sur les risques; et veiller à ce que les différentes solutions adoptées par les parties restent interopérables.
Le Secrétariat de la CITES s'emploie à examiner la meilleure manière d'offrir les avantages potentiels, tout en résolvant ces difficultés. Cela implique qu'un nombre suffisant de pays se dotent de systèmes automatisés de permis et d'échange d'informations, qui équilibrent la coopération en matière d'application des lois avec la facilitation des échanges.
Les pays les moins avancés désireux d'explorer l'automatisation sont des partenaires particulièrement importants dans cette entreprise. La communauté de la CITES, en collaboration avec ses partenaires, continuera à envisager le moyen le plus efficace d'appuyer les capacités de ces pays afin de concrétiser les avantages des outils et des processus modernisés.
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Haruko Okusu est responsable de la branche chargée de la gestion des connaissances et des services d'information du Secrétariat de la CITES. L'auteur souhaite remercier Markus Pikart (CEE‑ONU) pour ses efforts durant son mandat au Secrétariat de la CITES de 2016 à 2019, et pour sa contribution à cet article.
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