|
|
|
|
Les pays les moins avancés (PMA) sont un groupe de 47 pays à faible revenu très vulnérables au changement climatique, ainsi qu'aux autres chocs économiques et environnementaux. Bien qu'ils contribuent le moins au changement climatique, produisant moins de 1% des émissions mondiales de CO2, les PMA font preuve de leadership international pour renforcer leur action climatique en réponse aux défis auxquels ils sont confrontés.
Reconnaissant les lacunes en matière de données sur ce qui fonctionne pour mener une action climatique efficace, le Groupe des PMA sur le changement climatique, qui coordonne les efforts au titre de la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), a commandé un examen mondial pour améliorer la compréhension des meilleures pratiques, engageant plus de 600 experts et recevant 100 communications présentant des éléments de preuve.
L'examen s'inscrivait dans le cadre d'un processus délibératif plus large dans l'ensemble des PMA pour l'élaboration d'une Vision à l'horizon 2050 pour le Groupe, sur le long terme, visant à bâtir un avenir résilient au changement climatique, lancée en septembre 2019 lors du Sommet Action Climat des Nations Unies. Dans le cadre de cette vision, les PMA aspirent à suivre des trajectoires de développement résilient au changement climatique d'ici à 2030 et à atteindre un niveau d'émissions nul d'ici à 2050.
En lançant cette vision, le Groupe des PMA a montré son ambition accrue et appelle la communauté internationale à en faire autant à la vingt‑cinquième session de la Conférence des Parties (COP25) à la CCNUCC en décembre 2019.
Trois messages clés émanant de l'examen mondial
Premièrement, le renforcement de la résilience au changement climatique nécessite des approches à long terme en matière de renforcement des capacités. Parmi les réponses les plus efficaces pour lutter contre le changement climatique, certaines sont menées et contrôlées au niveau national, et permettent de renforcer les institutions, structures et systèmes de gouvernance nationaux en vue de gérer et de surmonter les risques climatiques à plus long terme.
Deuxièmement, une action coordonnée et cohérente à grande échelle est nécessaire pour toucher davantage de personnes et des zones géographiques plus vastes. Par exemple, déléguer la gouvernance, la planification et le financement climatiques du niveau national au niveau infranational peut permettre dans tous les pays d'atteindre le niveau local. Rassembler les différents acteurs, y compris les gouvernements, le secteur privé et la société civile, peut aussi faire en sorte que les réponses au changement climatique se complètent au lieu de faire double emploi. En outre, la cohérence des actions assure que les réponses aux engagements mondiaux, y compris les Objectifs de développement durable, l'Accord de Paris, le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe et les Objectifs d'Aichi pour la biodiversité, sont alignées pour l'efficience et l'efficacité.
Troisièmement, une approche socialement juste et inclusive est essentielle pour réduire la vulnérabilité à long terme. Promouvoir l'égalité des chances pour les femmes et les hommes en matière d'accès aux ressources économiques, au renforcement des capacités et aux technologies adaptées au genre est primordial pour renforcer la résilience des femmes et des hommes. De même, adopter une approche inclusive en investissant dans les organisations et les entreprises locales afin de mieux gérer les risques climatiques est essentiel pour renforcer la résilience au niveau local. Il faut pour cela une approche participative impliquant un engagement significatif de la part des acteurs locaux pour la conception et la mise en œuvre d'initiatives, en intégrant les connaissances locales et techniques afin de faire en sorte que les réponses au changement climatique soient adaptées au contexte et pertinentes.
Enseignements tirés des contributions déterminées au niveau national
Les 47 PMA ont élaboré et présenté des plans nationaux pour le climat appelés contributions déterminées au niveau national (CDN), énonçant les actions, les politiques et les mesures qu'ils mettront en place pour faire face au changement climatique et atteindre les objectifs de l'Accord de Paris.
Notre examen de ces plans a noté le leadership des PMA dans l'élaboration de ces plans et a reconnu la possibilité de les renforcer dans les trois domaines suivants.
Le premier point concerne une transition vers des stratégies nationales à long terme. Plusieurs CDN des PMA sont à court et moyen termes. Comme il a été noté, renforcer la résilience au changement climatique prend du temps, et les CDN devraient donc être intégrées dans des stratégies à long terme, à l'horizon 2050 ou plus. La Vision à l'horizon 2050 pour le Groupe des PMA lancée récemment vise à aider les PMA en matière de planification sur le plus long terme en vue de bâtir un avenir résilient au changement climatique.
Le deuxième point porte sur l'amélioration de la portée des mesures d'adaptation par l'intégration des secteurs et sous‑secteurs qui font actuellement défaut, y compris la protection sociale, la santé, l'éducation et les infrastructures. Ces secteurs vulnérables ne sont pas pris en compte dans de nombreuses CDN. En rassemblant tous les acteurs et les départements concernés à travers une approche englobant l'ensemble du gouvernement et de la société, on peut améliorer la coordination transversale et l'intégration de tous les secteurs vulnérables au changement climatique.
Dans un troisième temps, il s'agit d'expliquer comment les CDN seront mises en œuvre au moyen de mécanismes d'exécution stratégiques. Ces mécanismes sont des structures et des systèmes en place qui aident à la mise en œuvre des CDN et des plans pour le climat. Plusieurs CDN manquent d'informations concernant la manière dont les plans seront exécutés et les besoins financiers pour la mise en œuvre. La présentation des besoins spécifiques des pays en matière de financement, de capacités et de technologie, et la définition des circuits d'exécution, en s'appuyant sur les structures existantes dans les pays, permettront de préciser où un soutien est nécessaire, en aidant la communauté internationale à mieux cibler ses ressources.
Exemples de mécanismes d'exécution
Les mécanismes d'exécution peuvent être publics ou privés. Ils peuvent être utilisés pour contribuer à accroître la résilience au changement climatique des populations, des économies ou des écosystèmes, ou d'un mélange des trois.
Un exemple de mécanisme public est la collaboration avec les systèmes nationaux de protection sociale existants pour renforcer la résilience au changement climatique des populations. Ces systèmes ciblent déjà les catégories sociales les plus vulnérables, y compris les plus pauvres, les personnes âgées et les enfants, au moyen de travaux publics, de systèmes de garantie de l'emploi, et de programmes de pensions et d'alimentation scolaire. L'intégration de la gestion des risques climatiques dans les instruments régissant les systèmes nationaux de protection sociale existants peut aider les populations les plus vulnérables à surmonter la crise climatique.
Un autre exemple est la collaboration avec les autorités locales et les communautés locales, en vue de créer des approches de gestion intégrée visant à restaurer les écosystèmes endommagés. Étant donné qu'un écosystème dépasse souvent les frontières régionales, des arrangements de gouvernance commune sont nécessaires entre les autorités locales et les communautés locales pour soutenir une gestion efficace des écosystèmes s'étendant sur plusieurs juridictions et territoires. Étant donné qu'un écosystème englobe également les secteurs de la foresterie, de l'eau, de l'agroécologie et de la pêche, une approche intégrée entre les acteurs et les départements œuvrant dans ces domaines est nécessaire pour mieux faire face aux risques climatiques compte tenu d'un écosystème commun de nature largement interconnectée.
La collaboration avec les petites et moyennes entreprises en vue de développer des chaînes de valeur résilientes au changement climatique constitue un exemple de mécanisme de distribution privé. L'intégration de la résilience au changement climatique dans la chaîne de valeur, de la production à la transformation en passant par la commercialisation des produits, permet de faire en sorte que les petites entreprises continuent de prospérer et surmontent les effets climatiques associés, et d'ouvrir de nouveaux marchés pour les produits résilients au changement climatique. Les mécanismes d'exécution innovants, notamment par le travail avec les banques, offrent des possibilités pour canaliser le soutien aux entreprises locales, en utilisant de nouveaux services scripturaux – l'argent mobile par exemple – pour investir dans l'action climatique et atteindre une certaine échelle, y compris les zones rurales isolées.
Planifier à l'avance
Les enseignements tirés de ces études ont permis d'éclairer l'Initiative des PMA pour une adaptation et une résilience efficaces (LIFE-AR), qui aide les gouvernements des PMA à planifier et à mettre en œuvre leurs efforts d'adaptation et de résilience au changement climatique dans leur pays.
Au titre de cette initiative, les PMA cherchent à utiliser une approche coordonnée visant à développer des stratégies climatiques nationales à long terme alignées sur la Vision à l'horizon 2050 pour le Groupe des PMA. Ces stratégies renforceront leurs CDN, avec des circuits de distribution plus clairs, y compris au moyen de mécanismes publics et privés qui touchent le niveau local et les communautés les plus vulnérables, contribuant à accroître la résilience au changement climatique des populations, des économies et des écosystèmes.
------
Sarah McIvor et Sejal Patel sont des chercheuses en politiques relatives au changement climatique à l'Institut international pour l'environnement et le développement (IIED).
If you would like to reuse any material published here, please let us know by sending an email to EIF Communications: eifcommunications@wto.org.