La Guinée tente une coopération Sud-Sud avec la Tunisie
Aujourd'hui, le commerce en Guinée est principalement axé sur l'exportation de l'or et de la bauxite, qui sert à la fabrication de l'aluminium. Le pays possède les plus grands gisements de roche rouge du monde, et les prix de l'aluminium sont en hausse.
Cependant, environ 85% de la population guinéenne est constituée d'agriculteurs pratiquant une agriculture de subsistance, et le pays est l'un des plus pauvres du monde.
Afin d'accroître le potentiel de revenus agricoles du pays, un nouveau partenariat s'est formé dans le cadre d'une coopération Sud-Sud, la Tunisie offrant des enseignements tirés des initiatives qu'elle‑même a prises pour stimuler les exportations agricoles.
"Notre projet est le premier projet Sud-Sud en Guinée", a déclaré le Directeur Général de l'Agence de coopération technique de la Guinée, Patrice Camara, qui coordonne sa mise en oeuvre. "L'évolution du projet nous permettra de nous ouvrir au monde et de susciter l'intérêt d'autres pays pour la coopération technique et le partenariat économique."
Le projet a commencé par une visite du Président guinéen Alpha Condé, au Groupe de la Banque islamique de développement (BIsD) en 2017, au cours de laquelle il a demandé un soutien dans de nombreux domaines du développement, notamment l'agriculture. Cela a débouché sur une collaboration entre les gouvernements de la Guinée et de la Tunisie, avec la BIsD, la Société islamique internationale de financement du commerce (ITFC), le Cadre intégré renforcé (CIR) et la Banque arabe pour le développement économique en Afrique.
Leadership
La coopération Sud-Sud, dans ce cas, se fait par le biais du "mécanisme à flux inversé" de la BIsD, qui vise à renforcer et à accroître les échanges entre les 57 pays membres de l'Organisation de coopération islamique.
L'ITFC a déclaré: "La Tunisie a été choisie pour accompagner la Guinée par le biais de ces mécanismes. Pourquoi la Tunisie? Parce que la Tunisie est un leader dans la chaîne de valeur pour le secteur agricole."
Le succès de la Tunisie avec ses exportations de dattes sera utilisé comme modèle, et la Guinée cherche à développer son propre secteur agricole via une approche fondée sur la chaîne de valeur.
La vaste expérience de la BIsD en matière de coopération Sud-Sud, ou "mécanisme à flux inversé", sera mise à profit pour ce travail, notamment en développant la capacité d'un groupe de personnes ressources qui utiliseront les connaissances et l'expertise du côté tunisien et les transféreront à leurs homologues guinéens.
Le gouvernement guinéen entend utiliser l'agriculture comme catalyseur de la croissance économique et de la lutte contre la pauvreté rurale, et sa stratégie de promotion des exportations a identifié des produits à fort potentiel, dont la mangue et les noix de cajou. Le nouveau partenariat aidera la Guinée à répondre à ses nombreux besoins en matière de chaîne de valeur, y compris la réduction des pertes après récolte, l'emballage, le respect des normes internationales, etc.
L'agriculture contribuant pour moins de 10% aux exportations guinéennes, malgré une abondance de terres arables et de bonnes conditions climatiques, il y a beaucoup de marge de croissance.
Porter des fruits
"Les capacités sont insuffisantes pour tirer pleinement profit des possibilités d'exportation. Par exemple, nous avons un potentiel de production de mangues de 200 000 tonnes, mais nous n'en exportons que 2 000 tonnes par an. Il y a un manque de qualité et de compréhension de la demande du marché", a déclaré Mamadou Condé, de l'Agence Guinéenne de Promotion des Exportations.
Pour développer le nouveau partenariat, des experts tunisiens ont analysé les forces, les faiblesses, les opportunités et les contraintes de cinq chaînes de valeur potentielles de la Guinée: mangue, ananas, noix de cajou, café et banane. La mangue et la noix de cajou ont été sélectionnées pour des interventions basées sur le potentiel de croissance et de contribution à la création de richesse, entre autres facteurs.
Pour les mangues, il y a des problèmes de mouches des fruits, et les pertes après récolte varient entre 60 et 85% selon la région. De plus, il n'existe aucune organisation pour coordonner les relations entre les agriculteurs, les transformateurs et les exportateurs de mangues.
"Dans le cas des noix de cajou, nous sommes confrontés à une situation où la zone occidentale du pays produit très peu de noix de qualité alors que la zone orientale produit beaucoup de noix mais de mauvaise qualité. Cette situation doit être rectifiée", a déclaré M. Camara.
La production de noix de cajou est actuellement informelle et non organisée, et le pays vise à augmenter la quantité d'arbres plantés d'au moins 100 000 hectares.
Le nouveau projet abordera les problèmes identifiés dans les secteurs de la mangue et de la noix de cajou en partie en mettant en relation et en formant les parties concernées tout au long de la chaîne de valeur, des fonctionnaires du gouvernement à ceux qui travaillent dans le développement et la transformation des exportations. Les secteurs public et privé auront accès à l'expertise et aux enseignements de leurs homologues tunisiens, notamment par le biais de réunions interentreprises.
Maillon de la chaîne
"Les principaux défis sont la nécessité d'introduire des réformes pour permettre aux institutions de s'adapter au marché international et de se désengager de la production de matières premières pour progresser dans les chaînes de valeur mondiales", a déclaré M. Camara.
Le projet fournira deux unités pilotes de séchage des mangues, activité déjà pratiquée à petite échelle dans le pays. Les unités serviront de terrain de formation pour que d'autres puissent maîtriser les techniques requises.
La durabilité est une question abordée dans la conception du projet, compte tenu des dimensions individuelles, organisationnelles et institutionnelles afin de mieux assurer des améliorations durables.
"Nous voulons que la Guinée ait une position sur le marché international. Cela permettra d'aborder l'écosystème de la chaîne de valeur nationale et de créer des synergies entre les différentes composantes des chaînes de valeur", a déclaré l'ITFC.
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